Une Rencontre au Sommet | PV Jolly Roger

C'est aux abords d'une petite île indépendante que sa modeste embarcation individuelle jeta l'ancre. Encapuché, une longe cape couvrant l’entièreté de son corps, ne laissant que la partie inférieure de son visage partiellement visible, ce mystérieux individu se dirigeait vers les bas-quartiers de la ville principale. Marchant d'un pas sûr, parfaitement serein, comme s'il avait déjà visualisé sa trajectoire ou qu'il empruntait un chemin qui lui était familier; alors qu'il se rendait vraisemblablement sur cette île pour la première fois. Une tempête faisant rage depuis quelques heures déjà, les rues étaient désertes, lui laissant grand aise pour se déplacer avec liberté. Chacun des obstacles qu'il pouvait rencontrer dans sa marche était esquivé avec une anticipation relevant presque de la divination.


Une enseigne emportée par la force du vent dirigée dans sa direction qu'il évita d'une simple rotation du cours sans même le regarder, comme porté par une chance insolente; un groupe de Marine courageux, porté par les nombreuses rumeurs concernant l'arrivée de l'ennemi public numéro un sur l'île, évité cette fois-ci en prenant une rue parallèle au moment même où il aurait pu entrer dans leur champs de vision, comme si, encore une fois, une chance des plus terrifiantes veillait sur lui. Mais son faible sourire, à peine discernable sur son visage camouflé, laissait penser que tout ceci n'était pas le fruit du hasard.. Bien au contraire. Après moult déviation, il finit par arriver à destination.

Une petite bâtisse, où l'attendait une poignée d'individus des plus étranges mais qui paraissaient émerveillés par la simple présence de l'homme qui se tenait face à eux. Sans échange de mots, après une simple poignée de main "rituelle", comme un signe d'appartenance à un mouvement secret, les accueillants le laissèrent entrer en s'activant dans tous les sens, comme s'ils ne savaient pas comment agir en sa présence. L'un d'entre eux se dépêcha de saisir un parchemin vieillit, et en piteux état, qu'il tendit à l'homme mystérieux, qui n'avait pas dégagé son visage depuis son arrivé, comme s'il n'en ressentait pas le besoin.


▬ T.. Te.. Tenez Scarface, c'est une authentique copie des plans originaux.. bafouilla l'homme au parchemin, intimidé.

▬ Hm.. Comme je le pensais, elle n'a pas très bien vieillie et reste très endommagée. répondit Scarface d'une voix lente en ouvrant le parchemin, feuilletant les quelques pages en constatant les parties infimes de croquis qui restaient visibles.

L'homme grimaça, comme si le simple fait d'avoir déçu Scarface lui avait fait naître une véritable douleur aux entrailles. Il se mit à bafouiller de plus belle.

▬ V.. Veuillez nous.. exc.. excuser Scarface.. Notre contact.. Notre contact nous assura que c'était le seul schéma en circulation encore aujourd'hui. Personne à part son concept..

▬ Ne t'excuse pas, mon jeune ami. l'interrompit Scarface d'une voix des plus rassurantes. Le simple fait d'avoir pu mettre la main sur une relique pareille relève d'un effort incroyable, sans compter le risque que vous avez entrepris en stockant chez vous une chose pareille. Bien qu'elle soit presque illisible, je suis sûr que Maria y trouvera des informations intéressantes. Tsuuuuusususususu ! Vous nous avez été d'une grande aide messieurs, la Franc-Marinnerie vous remercie.

Le jeune homme restait ébahit devant cet individu à la présence écrasante. De tous les scénarios possible et inimaginable qu'il avait pu dresser sur la personnalité de sa trempe, jamais il n'aurait pu imaginer un homme si bienveillant et compréhensif. Ce n'est qu'après quelques instants de discussion, séduit par la candeur de ses pions, que Scarface changea brusquement d'attitude.


Quelque chose semblait avoir titillé son intérêt. Le regard dans le vide, affûtant progressivement sa concentration, laissant les jeunes hommes tenir des monologues sur la liberté et les vices du gouvernement mondial sans même les écouter. Il ferma les yeux, afin d'essayer de déceler ce qui le dérangeait. C'était une présence. Avec une aura particulière, extrêmement puissante. Rares étaient les personnes naviguant sur ses eaux possédant une aura d'une telle force. D'un coup, ses yeux se rouvrit, présentant un regard particulièrement féroce, comme secoué par la présence qu'il venait d'identifier.


Comme instinctivement, il déchargea sa volonté dans une onde invisible, emportant la conscience de toutes les personnes se trouvant dans la pièce, tombant dans un état léthargique instantanément. Quelques gouttes de sueurs perlèrent sur le front camouflé de Scarface. Il se devait de vérifier de lui même la raison de cette présence en ces lieux, qui, comme la sienne, ne pouvait être réellement fortuite. Il prit la direction des côtes, laissant ses bienfaiteurs dans cet état sans se retourner. Que ferait une personne telle que lui ici ? Il devait vraisemblablement se dire la même chose de son côté. Fidèle à lui même, Scarface se mit à réfléchir à tous les scénarios possibles en les liant habilement au travers de cheminements réflexifs dont il avait le secret, lui permettant d'anticiper les événements à suivre.


Une fois arrivé sur les lieux, il vit enfin la source de son inquiétude. Accompagné de sa sérénité légendaire, c'était Molière Tartuffe, pêchant innocemment malgré la tempête, et les eaux tumultueuses qui n'apporteraient certainement aucune prise. Bien que sa présence lui avait instinctivement fait développé son haki des rois, témoignant de sa puissance étonnante, Scarface ne pouvait s'empêcher de sourire. Il était dénué de toute combativité, de toute agressivité; pour être franc il était presque admiratif de se retrouver face à une légende pareille. Sans pouvoir empêcher un faible sourire, malgré la pression s'étant naturellement installée entre les deux hommes, malgré les vents puissants et les orages qui s'amplifiaient, il décidé de briser simplement la glace, en toute courtoisie.


▬ Le commandant des armées en personne.. Si j'avais su, je me serais fais bien plus discret. dit-il simplement, plein d'ironie, à quelques mètres de lui, faisant face à son dos, la lumière des éclairs laissant apparaître son visage de temps à autres.

Le monde était-il prêt à une rencontre entre ces deux hommes ? Comment Molière allait-il réagir face à l'ennemi public numéro, leader et roi des francs-marins ?

- Mh ? Oh... Oh !

Nonchalamment assis sur son rocher depuis plus de sept heures maintenant, Moliere Tartuffe n'est dans cette position que pour une raison. Une seule et unique.

- Chut, vous voulez bien ? Vous allez le faire fuir.

La situation est presque surréaliste. Ici, en cet instant, face à l'ennemi public numéro 1, le Commandant en Chef des Armées du Gouvernement Mondial préfère porter toute son attention sur sa canne. Elle remue frénétiquement, signe que quelque chose, enfin, a mordu à l'hameçon. Sous la pluie battante et le vent impitoyable, malgré les éclairs qui tambourinent le ciel, Moliere est imperturbable. Il n'y a que lui et sa prise. D'un seul coup, il ramène la canne vers le haut, dans un geste si rapide et puissant qu'il fait trembler le sol sous ses pieds. Mais le véritable spectacle ne réside pas là, non. Le véritable spectacle, c'est ce gigantesque monstre marin qui s'est fait sortir de l'eau, par une ligne tellement longue qu'elle est allée chercher la prise dans les eaux éloignées des côtes.


D'une taille phénoménale, doté de dents aussi grandes qu'une cabane, le Lapin des Mers est sur le point de s'écraser sur la côte et d'emporter le village tout entier avec lui.

- Encore un foutu rongeur ?! Nom d'un Cipher Pol à la couverture grillée, pourquoi je ne tombe jamais sur une Girafe, hein ? Vous le croyez, vous ?

Alors, comme si c'est la chose la plus normale au monde, Moliere Tartuffe pousse son bras vers l'avant, catapultant littéralement le monstre marin plusieurs centaines de mètres plus loin, dans les eaux sombres du Nouveau Monde. Une seconde, puis une autre, pendant lesquelles l'homme reste immobile, en pleine réflexion. Puis, soudain...


- J'AI BALANCÉ MA CANNE A PÊCHE EN MÊME TEMPS QUE LE LAPIN !

Le Commandant des Armées hésite. Dans la poche de son short, il y a un Den Den Mushi. Un simple coup de fil et le navire de la Marine le plus proche lui apporterait une nouvelle canne. Oui, ça, c’est une bonne idée. Moliere commence à descendre sa main, avant de se rappeler de la présence de cette autre personne, juste derrière lui.


Son visage se tourne vers l’homme aux longs cheveux noirs et à la cicatrice reconnaissable entre mille. Le criminel le plus recherché du monde. Deux acteurs que tout oppose, sur une scène sanglante. En fond, les éclairs qui tombent se rapprocher toujours plus, comme s'ils sentent que la tension gagne en intensité. Deux possesseurs de Haki des Rois, qui par leur seule présence peuvent faire perdre pied à la grande majorité du monde entier.

- Ca vous arrive de pêcher ? C’est vraiment efficace pour lutter contre le stress. Le problème, c'est quand on ne fait que tomber sur ces foutus lapins des Mers. Dans ces cas-là, je n’ai qu’une envie…

Il marque une pause, son visage se fermant petit à petit. Les traits de Moliere durcissent à vue d'oeil, des pensées destructrices lui traversant le cerveau de part en part. Son corps se tend, comme s'il se prépare à agir.


- C’est taper la tête de ces raclures de criminels jusqu’à ce qu’elles s’enfoncent complètement dans le sol.

Alors, d’un seul coup, dans un mouvement tellement rapide que seuls les yeux les plus entrainés et attentifs pourraient imaginer le percevoir, Moliere porte une main dans l’une de ses poches. Une arme peut-être ? Probablement. Face à lui, la cause d’une grande partie des troubles mondiaux. Face à lui, l’espoir d’un retour à la paix. Tout ce que cela implique, c'est de porter le premier coup. Le Cipher Pol l'a formé aux meilleures techniques d'assassinat. La Marine, elle, lui a inculqué un sens de la Justice plus fort que tout. Comment un représentant du gouvernement pourrait-il réagir autrement, après tout ?
Ils sont des ennemis naturels. La Mer est une Jungle, et ici, il n'y a guère de place pour l'hésitation.

- Mais aujourd’hui je suis en congés. Un gâteau ?

Moliere révèle alors le contenu de sa poche, un petit emballage plastique contenant ce qui ressemble à une grosse bouillie marron.

- Je me suis un peu assis dessus, mais le goût est le même. C’est cette sacrée Mama Delto qui me l’a préparé. Ne vous inquiétez pas, il n’est pas empoisonné. Mais bon, j’imagine que vous savez déjà tout ça, n’est-ce pas ?

Les trois mètres de haut de Moliere s’affaissent enfin. Il s’assoit près de son gros sac à dos et en sort une gourde ainsi qu’un petit gobelet qu’il remplit avant de le tendre à Scarface. Le numéro 2 du Gouvernement qui partage un saké avec son plus grand ennemi ?

- Je pensais vivre cet évènement seul, mais avoir un peu de compagnie, ce n’est pas plus mal.

Sans attendre, Moliere boit au goulot une longue gorgée de son saké à l’odeur forte. Le liquide lui réchauffe la gorge, avant qu’il ne se mette à rire.

- Si je ne m'abuse, aujourd'hui est un grand jour, non ? Kzohohohoho !